Cet étrange dérangement

Les Bonnie & Clyde de la Côte picarde

Dans son nouveau roman, François Vallejo imagine un couple qui se rencontre par hasard à Paris et part vivre un amour passionné sur la Côte picarde. L’eau fraîche ne suffisant pas, ils décident de vivre de menus larcins. Mais bientôt, ils sont traqués par la police et leurs familles respectives.

Blaise Astor a dû mettre fin à sa carrière de doubleur de films et s’est reconverti en chauffeur VTC. Avec sa nouvelle Lexus électrique blanche, il espère attirer les clients. Une première course est réservée du côté de la rue Soufflot. Mais quand il arrive à son lieu de rendez-vous, personne. Ou plutôt une étrange apparition, celle d’une femme nue perchée sur le toit d’un immeuble. Spectacle étrange et fascinant, mais aussi très risqué. Fort heureusement l’intervention des pompiers va permettre de sauver Iris Bila. La jeune femme accepte de se couvrir de la doudoune jaune de Blaise avant de prendre la direction de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière.

Le choc passé, Blaise va bien tenter de récupérer sa veste, mais en vain. C’est Iris qui va finalement le recontacter pour lui rendre le vêtement. Des retrouvailles qui vont entraîner le couple dans une histoire d’amour aussi torride qu’inattendue. Très vite Blaise et Iris ne vont plus se quitter, si bien que leur relation va prendre le pas sur leur profession. Avec l’aide d’un vieil ami, Blaise et Iris vont choisir de partir pour la Côte picarde et d’emménager dans une villa en ruine avec vue sur la mer. Après avoir dépensé leurs dernières économies, ils vont se livrer à de petits larcins pour subvenir à leurs modestes besoins.

Mais la réussite de leurs premiers vols va les entraîner sur une pente dangereuse.

Il va désormais leur falloir louvoyer entre deux écueils, d’un côté leurs familles respectives qui ne voient pas d’un très bon œil cette relation dévorante et de l’autre les enquêteurs partis sur la piste de ces Bonnie & Clyde de la Côte picarde. Leurs familles — plus inquiètes pour leur image que pour leur sort — cherchent à les faire revenir à la raison. Les enquêteurs, alertés par une série de méfaits dans la région, commencent à les prendre au sérieux. La tension monte, mais elle reste secondaire. Vallejo n’écrit pas un thriller : il radiographie une folie à deux, née d’un besoin vital d’échapper à l’asphyxie.

Ce qui l’intéresse, c’est le trouble qui naît quand deux êtres dissonants s’assemblent et que leur union devient un refus du monde. Iris et Blaise ne cherchent pas à fuir la justice : ils fuient l’ordre, la norme, les injonctions d’une société qui n’a jamais su que faire de leurs désirs. Elle, standardiste dans un hôpital, ex-chanteuse lyrique, traîne derrière elle un sentiment d’inachevé. Lui, évincé du doublage, reconverti sans conviction dans un métier sans avenir. Deux perdants, mais deux cœurs en fusion à la marginalité assumée. Ils vivent en dehors du monde, mais aussi à l’écart de leurs propres repères.

Cette exploration des marges laisse filtrer une émotion sourde. Iris et Blaise ne sont ni des héros ni des victimes. Ils sont simplement deux êtres qui, un jour, ont choisi de ne plus composer. Cela ne les absout pas, mais cela les rend inoubliables.

NB. Tout d’abord, un grand merci pour m’avoir lu jusqu’ici ! Sur mon blog vous pourrez, outre cette chronique, découvrir les premières pages du livre et en vous y abonnant, vous serez informé de la parution de toutes mes chroniques.