
Mille petits riens
Résumé éditeur
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l’avis des lecteurs
Jodi Picoult écrit depuis les années 90. Je l’ai découverte avec « La tristesse des éléphants » paru en 2017 chez Actes sud, un livre magnifique et étrange qui m’a marquée au point que j’ai eu très envie de lire « Mille petits riens » pourtant complètement différent. C’est un roman bien ancré dans la réalité où Jodi Picoult parle du racisme qui gangrène l’Amérique depuis toujours : un thème qu’elle voulait aborder depuis longtemps mais pour lequel elle a eu du mal à trouver l’angle d’approche, se sentant peu légitime vu son parcours de privilégiée blanche avec des études à Princeton puis à Harvard. Elle a trouvé le bon, c’est sûr et nous offre un très beau roman intelligent et captivant. Il est en cours d’adaptation cinématographique avec Viola Davis et Julia Roberts dans les rôles principaux.
« Ruth est sage-femme depuis plus de vingt ans. C’est une employée modèle. Une collègue appréciée et respectée de tous. La mère dévouée d’un adolescent qu’elle élève seule. En prenant son service par une belle journée d’octobre 2015, Ruth est loin de se douter que sa vie est sur le point de basculer.
Pour Turk et Brittany, un jeune couple de suprémacistes blancs, ce devait être le plus beau moment de leur vie : celui de la venue au monde de leur premier enfant. Le petit garçon qui vient de naître se porte bien. Pourtant, dans quelques jours, ses parents repartiront de la Maternité sans lui.
Kennedy a renoncé à faire fortune pour défendre les plus démunis en devenant avocate de la défense publique. Le jour où elle rencontre une sage-femme noire accusée d’avoir tué le bébé d’un couple raciste, elle se dit qu’elle tient peut-être là sa première grande affaire. Mais la couleur de peau de sa cliente, une certaine Ruth Jefferson, ne la condamne-t-elle pas d’avance ? »
Jodi Picoult construit son roman à trois voix, elle alterne les voix de Ruth, Kennedy et Turk, narrateurs à tour de rôle. Dans le même temps ces voix se mêlent, se répondent et éclairent d’autant d’angles différents les mêmes évènements, la même tragédie et le procès qui en découle. Ces éclairages contrastés, opposés mettent cruellement à jour les inégalités qui persistent entre les Noirs et les Blancs encore aujourd’hui et le racisme rampant quotidien de gens qui pourtant parfois s’en défendent.
Jodi Picoult s’est beaucoup documenté, elle a rencontré des sages-femmes, des mères noires, des suprémacistes repentis… C’est une situation réaliste et sombre qu’elle présente avec justesse dans ce roman au suspense continu, on est captivé par cette affaire, les différentes étapes du procès depuis le choix des jurés jusqu’au verdict final, l’évolution des personnages… on a du mal à lâcher le bouquin.
Jodi Picoult a un talent immense pour créer de beaux personnages, parfaitement crédibles. Ils sont profondément humains et l’empathie fonctionne, avec tous, oui, même avec Turk, qui est pourtant un sacré connard, mais aussi un pauvre type paumé qui s’est trouvé une famille chez les racistes. Des suprémacistes dangereux parce qu’ils ne sont pas que des abrutis, ils savent utiliser le net pour leur propagande, ne sont plus des skinheads violents, se fondent dans la masse, sociopathes en puissance. Le deuil frappe les pauvres types comme les autres et Ruth, la sage-femme, est paradoxalement une de celles qui peut le mieux comprendre sa souffrance.
Ruth et Kennedy sont deux personnages de femmes magnifiques. Ruth, fille de domestique, brillante à l’école, s’est toujours pliée à ce qu’on attendait d’elle et a réussi à se construire une vie respectable sans jamais oublier, car elle en a peu l’occasion, que rien n’est jamais acquis. Elle a toujours dû se battre et se méfie des « sauveurs ». Kennedy, jeune avocate privilégiée et progressiste comprend peu à peu l’étendue des privilèges que révèle la phrase « je n’attache pas d’importance à la couleur de la peau ». Le roman est aussi celui du chemin qu’elles vont faire l’une vers l’autre.
Un très beau roman, source de réflexion universelle.
Avec ce roman choral, Jodi Picoult aborde le sujet ô combien épineux du racisme de la société américaine. Pourquoi épineux ? C’est justement ce qu’elle s’évertue à démontrer…
Ruth exerce depuis vingt ans comme infirmière à la maternité de l’hôpital de West Haven. Elle est la première voix à se faire entendre, au fil d’un récit empreint d’un pragmatisme qui révèle à la fois son professionnalisme et la passion qu’elle voue à son métier. Veuve d’un militaire mort en Afghanistan, elle mène le reste de sa vie avec tout autant de droiture et de sérieux, portée par les valeurs de travail et d’honnêteté qu’elle a inculquées à son fils Edison, adolescent sans histoire et élève brillant. Une citoyenne modèle en somme, parfaitement intégrée dans la société. Cette notion d’intégration est d’ailleurs pour elle primordiale, mais elle est aussi au cœur du roman. Je n’ai pas -encore- précisé que Ruth est noire. Elle-même a d’ailleurs tout fait pour oublier que cela avait une importance, jusqu’à ce qu’un dramatique événement le lui rappelle de manière cruelle…
La deuxième voix est celle de Turk Bauer, jeune homme blanc, et qui en tant que suprémaciste, le revendique comme un gage de supériorité. Sa glaçante vision du monde s’est forgée dès son adolescence au contact de groupuscules d’extrême-droite, dont un des leaders est devenu son mentor puis son beau-père. Ce charmant personnage, dont le crâne est tatoué d’une croix gammée, et qui quand il a besoin de passer ses nerfs part à la chasse aux homosexuels, est sur le point de devenir père. C’est à la maternité de West Haven, où accouche sa femme Brittany -qui n’a rien à lui envier en matière d’ignominie-, que le couple rencontre Ruth. Une rencontre brève, qui se solde par l’interdiction pour l’infirmière, à la demande des Bauer, d’approcher leur bébé. Or, ce dernier décède brutalement dans d’obscures circonstances. A l’initiative des parents, et avec la bénédiction d’une administration hospitalière bien contente de se décharger de toute responsabilité, Ruth est accusée de meurtre.
C’est là qu’entre en scène la troisième voix, celle de Kennedy, avocate commise d’office, qui a choisi par vocation -et parce que le salaire confortable de son médecin de mari le lui permet- d’exercer dans le secteur public. C’est elle aussi une femme pragmatique et très travailleuse, par ailleurs dotée d’un solide sens de l’humour et d’une vivacité d’esprit qui rendent son récit agréablement piquant. Consciente que sa tâche s’apparente à l’ouvrage d’un Sisyphe, elle sait se contenter de petites victoires obtenues d’arrache-pied… Son implication dans le procès de Ruth -avec laquelle elle noue une relation amicale-, dépasse largement le cadre professionnel, et bouleverse sa propre perception de la question raciale.
C’est donc autour de cette dernière que tourne "Mille petits riens". Du point de vue de Ruth, cela consiste en la prise de conscience que malgré ses efforts pour faire oublier sa couleur de peau et mettre en avant ses qualités d’individu, le fait d’être l’unique infirmière noire de la maternité, finalement, compte. Qu’elle aura beau être la meilleure dans tout ce qu’elle entreprend, elle finira toujours par se heurter à cette barrière infranchissable qui fait que lorsqu’elle parcourt les rayons d’une supérette, c’est sous l’œil suspicieux du vigile, ou qu’on lui réclame lors de son passage en caisse un justificatif d’identité dont a pu se dispenser la cliente blanche la précédant… et elle se sent soudain épuisée de devoir en permanence faire attention à ne pas être trop noire, à faire profil bas, à ne jamais évoquer ces injustices pour garder sa place parmi les blancs comme si elle leur devait une éternelle reconnaissance de l’avoir acceptée…
Des pistes de réflexion passionnantes, mais que l’auteure traite de manière parfois manichéenne, en confrontant l’irréprochabilité de Ruth au racisme décérébré de Turk.
Là où j’ai trouvé le propos vraiment intéressant, c’est dans son analyse de ce qu’elle qualifie de "racisme passif", représenté par le personnage plus nuancé de Kennedy, qui affiche un anti-racisme de bon aloi, mais ne s’est jamais réellement interrogée sur sa responsabilité et celle de ses semblables dans la persistance d’une ségrégation inhérente à la société américaine. Elle l’a jusqu’à présent, de manière passive, favorisée, en occultant son statut de citoyenne privilégiée, car évoluant dans un système conçu par et pour des personnes comme elle, nourri de représentations auxquelles elle peut s’identifier. Or, lorsqu’on est privilégié, c’est aux dépens de ceux qui ne le sont pas… le cas de Ruth la renvoie par ailleurs à la limite des mobiles qui l’animent en défendant les plus vulnérables. Même inconsciemment, elle profite du malheur des noirs -la majeure partie de sa "clientèle"- pour se mettre en valeur en jouant les sauveuses. Mais à l’image d’une justice américaine censée être la gardienne légale d’une société post raciale et au sein de laquelle la discrimination est donc taboue, elle colmate et répond au système, mais ne le remet pas en question, acceptant comme fait établi que les noirs n’aient pas le même traitement, les mêmes chances.
Ce qui est dommage, c’est que là aussi, Jodi Picoult illustre son propos de manière souvent didactique, le martelant plutôt que de laisser parler les faits et de faire confiance au lecteur… Ajouté à une fin trop heureuse pour être crédible, cela a amoindri le plaisir de la lecture, pourtant rendue plaisante par la fluidité de l’écriture et une intrigue addictive.
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