L'oeil le plus bleu
Résumé éditeur
En stock
Précommande
l’avis des lecteurs
L’intrigue se déroule sur quatre saisons, mais en même temps, à la "manière Morrison" elle déborde, au gré de flash-backs, s’engouffrant dans des digressions qui finissent par ne plus en être.
La narratrice, Claudia, dix ans, vit à Lorrain, bourgade industrielle de l’Ohio, dans les années 1940.
Elle observe la petite communauté qui l’entoure, restitue les événements en s’efforçant de traduire les images mentales qu’ils suscitent en elle. C’est parfois confus pour le lecteur, mais cela confère au texte une spontanéité et une profondeur hautement crédibles, en même temps qu’est ainsi traduite l’opacité dont les actes et les motivations des adultes peuvent se parer aux yeux d'un enfant.
Le récit de Claudia se focalise sur l’histoire de la famille Breedlove, à l’origine d’un épisode qui l’a durablement marquée. On y compte Mrs Breedlove, qui se considère comme chrétienne intégrée et travaille au service de riches blancs ; son mari Cholly, un buveur et un bon à rien "au-delà de toute rédemption", et enfin leur fille Pecola, gamine assoiffée d’amour et obsédée par le secret d’une laideur qu’elle juge responsable du mépris ou de l’ignorance que lui renvoie le monde et à laquelle elle n’envisage qu’un seul remède : avoir des yeux bleus.
L’incursion dans ce quotidien d’afro-américains modestes, voire miséreux, est triste et brutale. C’est un univers de laideur, non pas intrinsèque, mais parce que la beauté n’y survit jamais longtemps. Les efforts pour soigner son apparence et sa dignité se délitent sous les assauts de la pauvreté et de la violence, font place au laisser-aller. Les enfants, quand ils ne sont pas abandonnés, y sont fréquemment maltraités. Les hommes abrutis par le désespoir et déstabilisés par des responsabilités qu’ils n’ont pas appris à endosser, boivent, font de la prison, épuisent les désirs qui les hantent sans possibilité d’assouvissement dans les dérèglements et la perversion. Quant aux femmes, assujetties dans leur foyer et au travail, elles accueillent la vieillesse avec soulagement, usées mais enfin libérées des efforts pour plaire, du risque d’agression sur les routes, des caprices de leurs employeurs...
Ce sont des vies de renoncements et d’humiliations, marquée par la terreur permanente de finir à la rue.
Mais ce que voit surtout Claudia, du haut de ses dix ans, c’est la cause principale de ces pathétiques conditions d’existence : le mépris dans lequel on tient ceux de sa race, les signes d’une sujétion qui a fini, de manière inconsciente mais puissante, par être assimilée par ceux qui en sont les victimes, qui en ont développé un sentiment d’infériorité. La plupart cultivent ainsi un rejet de leur propre couleur, une haine de soi cultivée à coups de jalousie, d’envie, entretenue par une hiérarchie de la noirceur même, dont le degré détermine votre statut et votre valeur aux yeux du monde. Les métis, par exemple, sont considérés comme propres et calmes, quand leurs frères à la peau plus foncée sont fatalement taxés de fainéantise et de négligence. Cette évocation des impacts psychiques de la ségrégation sur la population afro-américaine m’a par moments fait penser à l’essai de Frantz Fanon, Peaux noires, masques blancs.
La jeune narratrice, intuitivement convaincue de l’injustice et de la bêtise de ces inégalités, est quant à elle prise d’un sentiment de révolte qui l’amène à démembrer avec rage les poupées blanches et blondes -aux yeux bleus- dont les autres fillettes noires font des objets sacrés.
Comme souvent chez Toni Morrison, la lecture peut paraître abrupte, déstabilisante, qu’il s’agisse de la forme -par ses coq-à-l’âne et cette manière de livrer, parfois à l’état brut, les pensées de ses personnages- ou du fond, qui mêle en toute fluidité humour et tragédie -certaines scènes sont quais insoutenables-, vérité et imagination.
Le ton de la narratrice, dénué de tout angélisme, oscille entre naïveté crue et relation presque froide des drames dont elle est témoin. Il s’en dégage aussi, étrangement, une sorte de chaleur, que provoque l’évocation spontanée des aspects organiques, charnels, des intimités familiales.
Tout cela fait de "L’œil le plus bleu" un texte intense et marquant.
Livraison soignée
Nos colis sont emballés avec soin pour des livres en excellent état
Conseil de libraires
et des sélections personnalisées pour les lecteurs du monde entier
1 millions de livres
romans, livres pour enfants, essais, BD, mangas, guides de voyages...
Paiement sécurisé
Les paiements sur notre site sont 100% sécurisés