Cannisses - Far West
Résumé éditeur
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l’avis des lecteurs
Ce recueil était l'ouvrage offert cette année par le salon Lire en poche de Gradignan (33). L'an dernier c'était un ouvrage de SF méconnu dont je n'ai pas dépassé les dix premières pages, et l'édition précédente proposait si je me souviens bien des nouvelles policières pas terribles non plus... Bon, en même temps, on ne s'attend pas forcément à ce qu'un livre gracieusement mis à disposition de milliers de visiteurs soit le chef-d'oeuvre du siècle (mais c'est un concept à creuser...). Sauf que là, l'auteur du livre en question n'est pas vraiment un obscur inconnu... et il ne m'a pas déçue (même si on est quand même loin du chef d'oeuvre du siècle, hein, mais ça vous le saviez déjà...) !
Marcus Malte nous offre (c'est le cas de le dire) avec cet ouvrage constitué de deux longues nouvelles une excellente illustration que l'on peut faire court sans être expéditif, et démontre un réel talent pour planter en quelques coups de plume des ambiances prégnantes et des personnages palpables.
Mon texte préféré est celui qui ouvre le recueil : "Canisses", récit du basculement d'un homme dans une démence entretenue par le traumatisme de la perte de sa femme. Veuf et encore relativement jeune, père de deux enfants, il observe, caché derrière ses canisses, la famille de la maison d'en face, sa routine sans drame, et en vient à se persuader que le cancer qui a tué sa femme est dû à une malédiction liée au pavillon qu'ils avaient choisi. Pris au piège de cette conviction qui devient obsessionnelle, il ourdit un plan pour sauver ses enfants.
Le lecteur, comme le narrateur un peu voyeur car spectateur d'un délire profondément intime, mais pris aussi de pitié pour cet homme terrassé par son malheur, assiste avec effroi à l'enchaînement des mécanismes que son esprit malade met en place pour l'affronter. On éprouve même une forme d'impuissance glaçante face à cet enfoncement dans le gouffre de plus en plus obscur d'une absurde logique le menant inéluctablement à la démence.
"Far West" est divisé en deux parties sans surprise intitulées "Les Cow-boys" et "Les Indiens", sauf que ce n'est pas de la conquête de l'Ouest dont il y est question, et que ce n'est qu'avec beaucoup d'imagination que l'on fera le lien entre leurs intrigues respectives, clairement distinctes.
La première met en scène la communauté d'un bourgade du Mississippi vaguement mise en émoi par la présence en ses rues d'un individu se promenant avec un lézard géant en laisse. Contrairement à ce que ces prémisses pourraient laisser penser, ce n'est pas dans la fantaisie que nous entraîne l'auteur, malgré la dimension souvent mordante et narquoise du texte. Si l'on peut pourtant dire de son récit qu'il est hanté, c'est non pas par les fantômes de défunts, mais par le spectre de doctrines qui ne devraient plus avoir cours. On nous rappelle au passage que l'état du Mississippi est le dernier à avoir ratifier l'interdiction de l'esclavage (en 1995 !). Et c'est bien au cœur d'une certaine Amérique rurale, rude, violente, figée dans le passé, refusant la fin de la prédominance blanche, que nous sommes plongés. Banalisation des armes à feu, racisme, homophonie, sont ainsi évoqués sous prétexte d'une enquête policière qui ne sert ici que de faire valoir, dans ce récit où se mêlent étrangeté et prosaïsme sordide.
La deuxième partie du diptyque nous ramène en France, aux côtés d'un sombre trio : son unique membre féminin vient d'égaler ses compagnons en ajoutant un deuxième mort à son actif... et c'est peu à peu, à l'occasion des circonvolutions d'une histoire axée sur une ces rencontres improbables mais salutaires que réserve parfois le hasard, que l'on apprendra les circonstances des six décès dus aux protagonistes de cette brève fable des temps modernes, qui voient, dans l'indifférence générale, au cœur de quelque lointaine forêt amazonienne, s'éteindre les derniers Indiens ...
Marcus Malte est un grand. Un très grand. Ceux qui ont lu Intérieur Nord savent déjà qu’il est aussi à l’aise dans le format novella (ces longues nouvelles ou courts romans) que dans celui du roman classique. Avec Cannisses il le confirme de façon éclatante.
Dans un de ces lotissements ou toutes les maisons se ressemblent, un homme souffre. Il vient de perdre sa femme, cancer, et se retrouve seul à élever deux jeunes enfants. En face, de l’autre côté de la rue, il observe à travers les cannisses une autre famille, heureuse. L’autre a toujours sa femme, la gamine a toujours sa mère. Pourquoi ? Pourquoi le malheur s’est-il abattu sur lui et pas sur eux ? Quelle justice en a décidé ainsi ? Est-ce qu’ils ne lui ont pas volé quelque chose ?
Dès le premier chapitre Marcus Malte vous prend aux tripes pour ne plus vous lâcher. Certaines religions, certains moralistes essaient de nous faire croire que la douleur peut rendre meilleur, plus compatissant ou plus fort. Conneries. La douleur rend méchant, la douleur rend égare, la douleur rend fou. Et les victimes ont vite fait de se transformer en bourreaux.
C’est ce glissement vers la folie auquel on assiste ici. On sent bien le début de la fêlure dès les premiers mots de la narration à la première personne. Et on la voit s’élargir, devenir fissure puis crevasse. Avec une apparence de normalité, une écriture « plate », sans grande envolée rageuse ou hystérique, une écriture qui colle parfaitement à cette apparence de normalité.
Un texte à la fois bouleversant et glaçant.
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