
N'essuie jamais de larmes sans gants
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Années 1980, Suède.
Jonas Gardell met en scène des membres de la communauté homosexuelle de Stockholm "formant famille", ainsi qu’ils le définissent eux-mêmes. La plupart viennent d’ailleurs, ont fui une province et/ou des proches auprès desquels ils ne pouvaient vivre selon ce qu’ils étaient. Si la capitale suédoise devient le lieu de leur émancipation, il est aussi celui qui va les confronter à la maladie et à la mort. C’est ce que raconte "N’essuie jamais de larmes sans gants". Pour ne pas oublier.
C’est Kopporn, petite bourgade du XX du pays, que Rasmus a fui. Elevé dans un foyer aimant, choyé par une mère très affectueuse, il a longtemps subi les moqueries de camarades qui avaient sans doute décelé la nature d’une différence que lui-même n’a compris qu’une fois devenu lycéen. Il a rejoint la capitale dès que possible, avide d’émancipation et d’aventures, décidé à prendre tout ce qui surgira sur son chemin.
Benjamin a grandi à Stockholm, dans une famille de témoins de Jéhovah. Lui-même était un membre très prometteur de sa communauté, aussi consciencieux qu’enthousiaste. Lorsqu’il a découvert, presque par surprise, son homosexualité, il a dû quitter ses proches, qui ne lui ont plus adressé la parole. C’est un jeune homme droit, sincère et profondément empathique, qui rêve d’un amour unique et réciproque.
Il rencontre Rasmus chez Paul, trentenaire exubérant et toujours joyeux, doté d’un cinglant sens de l’humour. Pilier de la communauté homosexuel de la ville, il est aussi le centre de gravité du cercle d’amis qu’intègrent nos deux héros, qui bientôt se mettent en couple.
C’est donc une histoire d’amour, avec un grand A.
C’est aussi une histoire d’amours "sales" et de sexe brutal, pratiqué dans des pissotières puantes ou les arrière-salles de clubs sordides, sur des banquettes de voiture, avec des hommes que l’on trouve parfois repoussants. La capitale, pour ceux qui y débarquent avec l’intense désir d’y rencontrer leurs semblables, d’y trouver un miroir, une référence à laquelle pouvoir enfin s’identifier, est le lieu d’une liberté grisante et de tous les possibles, où ils vont briser leur solitude en même temps qu’assouvir des pulsions sexuelles jusqu’alors refoulées.
Le début des années 80 est aussi celui d’une libération homosexuelle encore timide. La reconnaissance juridique et sociale des relations entre personnes du même sexe est tout juste en train d’être gagnée aux Etats-Unis et en Europe de l’Ouest. A peine trois ans plus tôt, considérés comme des malades mentaux, les homosexuels étaient contraints au silence et à l’invisibilité.
L’épidémie de sida vient contrecarrer cette avancée, ramenant ses victimes à la honte et au tabou, ravivant l’expression d’une haine qui n’a pas encore eu le temps de se tarir.
Le roman restitue remarquablement les étapes de l’épidémie, les premiers signes auxquels on n’accorde pas assez d’importance, l’ampleur grandissante de sa progression, la panique qu’elle suscite et les odieuses rumeurs qui en découlent, entretenues par certains médias. La maladie est pour beaucoup considérée comme un châtiment visant à punir les homosexuels. Dans cette Suède qu’on imaginait à tort libérale, on distingue ainsi les contaminés "coupables" des innocents (les hétérosexuels et ceux qui ont contracté la maladie suite à une transfusion sanguine). Pire, on accuse les premiers de répandre volontairement l’épidémie. Il est même question de les ficher puis de les interner pour limiter la propagation du virus. On n’en vient finalement pas à ces extrémités, mais les malades, lorsqu’ils sont hospitalisés, sont maintenus dans un isolement inhumain. L’ignorance initiale quant aux modes de transmission de la maladie incite à prendre des mesures de précaution quasi ubuesques. Certains soignants refusent de toucher ces patients dont la prise en charge est souvent tardive et/ou défaillante. L’enfer dans lequel vivent alors les homosexuels nous est révélé à travers les destinées des proches de Rasmus et Benjamin. C’est une période de souffrances inouïes et de pertes multiples, de la confrontation à la lente et terrible dégradation qui dévaste les amis infectés. Et il y a cette terreur obsédante, d’être contaminé ou de contaminer l’autre, qui gangrène les relations. La douleur du deuil est par ailleurs accentuée par l’irrespect envers les morts, dont la cause du décès est tue et l’homosexualité niée. Les familles transforment leurs défunts en hétérosexuels pour se les réapproprier et pouvoir les pleurer, et écartent cruellement ceux qui de leur vivant les ont accompagnés.
C’est un roman poignant et d’une précision contextuelle qui le rend passionnant, servi par une structure narrative au départ un peu déstabilisante mais qui donne au récit un rythme singulier, et renforce son propos. Les épisodes se succèdent en une chronologie déstructurée qui donne l’impression de saisir la vulnérabilité des êtres face à la fulgurance des drames qui viennent ravager leurs existences, en même temps qu’elle nous met face à leur émouvante complexité, puisqu’en entremêlant passé, présent et futur, Jonas Gardell dresse de ses héros des portraits ultimes et entiers. Et puis il y a la langue, enfin, énergique, directe et souvent crue, qui fait de "N’essuie jamais de larmes sans gants", malgré la noirceur de son sujet, un texte intensément vivant.
Très fort.
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