L'Ange et Pasolini

Cette biographie graphique célèbre le cinquantenaire de la mort de Pier Paolo Pasolini. Réalisée par Denis Gombert, Arnaud Delalande et Éric Liberge, c'est une superbe bande dessinée aussi troublante que fascinante à l'image de son sujet. Poète au regard brûlant, écrivain aux mots incisifs, cinéaste italien qui a osé défier les conventions. Nous découvrons ce qu'a été sa vie tumultueuse, pleine de contradictions, qui s'est tragiquement achevée sur une plage d'Ostie, en novembre 1975, où il a été sauvagement assassiné.

Le récit débute avec la mort de Pasolini, une scène insoutenable qui devient le point de départ d’un dialogue introspectif entre lui et un ange. Ce dernier incarne ses doutes et ses combats intérieurs. La narration explore ses multiples facettes : militant marxiste en rupture avec le Parti communiste, catholique mystique en conflit avec l’Église, et homosexuel assumé dans une Italie conservatrice. Les scénaristes tissent habilement la trame narrative, entremêlant les moments clés de sa vie. De son enfance marquée par la perte de son frère, au fascisme jusqu'à sa consécration au Festival de Cannes en 1974, en passant par ses scandales et ses chefs-d'œuvre cinématographiques. La façon dont l'histoire est racontée, avec des bouts de poésie et des moments laissés en suspens, aide à montrer les contradictions de Pasolini.

Le style d'Éric Liberge est magnifique. Son dessin en noir et blanc donne une atmosphère à la fois triste et rêveuse à l'histoire. Les cadrages cinématographiques et les pleines pages sont saisissantes et rappellent des scènes de film de Pasolini. Il a su capter l'essence de son regard sur le monde. Certaines scènes, notamment celles de son assassinat, sont tellement intenses que ça nous prend aux tripes.

Plus qu'une simple biographie, L'Ange Pasolini est une plongée sensible dans l'âme d'un artiste unique, génial et dérangeant. Un bel hommage qui nous invite à redécouvrir son œuvre et à réfléchir à son héritage. Bonne lecture.