Panorama
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Quand viendra le règne de la transparence
Dans son nouveau roman, Lilia Hassaine raconte comment après la «nouvelle Révolution» de 2029, la France s’est installée dans la société de la Transparence. Une société qui se veut modèle jusqu’au jour où un grain de sable vient enrayer ce beau mécanisme, une famille disparaît.
Hélène vit avec sa fille Tessa et son mari David dans une maison de verre, architecture qui s’est imposée progressivement dans le pays après une nouvelle Révolution qui a eu lieu en 2029. Désormais tout est transparent. «Aucun dictateur ni despote. La société s’est régulée d’elle-même, par capillarité. La nouvelle démocratie française n’est pas une dictature: vous êtes libres de vivre en sécurité dans les quartiers transparents, ou d’habiter dans des zones de non-droit en marge des villes. La Transparence est un « pacte citoyen fondé sur la bienveillance partagée et la responsabilité individuelle », d’après le préambule de la Constitution de 2030.»
Les résultats ne se sont pas fait attendre, la délinquance est quasi-inexistante, la solidarité bien réelle et David, qui était un peu volage, s’est assagi. Hélène, ancienne commissaire de police, est désormais «gardienne de protection» et s’ennuie un peu. Jusqu’à ce 17 novembre 2049 où va se produire le plus improbable des faits divers. Une famille habitant le quartier le plus huppé de la ville va disparaître. «Les Royer-Dumas ont été aperçus pour la dernière fois à 17 h 07 par la patrouille de voisinage. Comme tous les jours, Milo était rentré de l’école à pied. Ses parents l’attendaient. Le rapport n’indique rien de plus.»
Hélène se voit confier l’enquête par son supérieur, qui la mandate avec son tact habituel: «Hélène Dubern, cette affaire est pour vous. Les autres sont des brêles».
Avec son collègue Nico, elle se rend sur place et commence ses investigations. Très vite, elle se rend compte combien les indices manquent. Une petite tache de sang appartenant à la mère est prélevée dans l’appartement, mais sans pour autant mener à une piste. L’enquête de voisinage ne fournira pas davantage de piste sérieuse, mais elle nous permettra de découvrir l’état d’esprit de ces voisins qui voient tout de ce qui se passe à côté d’eux, alors qu’ils feraient peut-être mieux de balayer devant leur porte.
Hélène finit par apprendre qu’une altercation aurait eu lieu la veille de la disparition de Rose, Miguel et leur fils Milo. Là encore, rien de probant. Milo est décrit comme plutôt solitaire et peu aimé de ses camarades car il s’attaquerait aux animaux. Le temps passe, l’enquête piétine. Elle est même quasi-classée jusqu’au jour où, suite à des travaux de terrassement, on retrouve deux cadavres enterrés au pied de la maison.
Pour Hélène, le moment est venu de montrer tout son savoir-faire. Il faut dire qu’elle peut s’investir dans sa mission, David lui ayant laissé le champ libre en la quittant. «L’amour s’évaporait à mesure qu’il s’étalait, il explosait à mesure qu’il s’exposait.»
Avec beaucoup de finesse, la romancière se sert des codes du roman policier pour raconter cette société future qui se voulait modèle et qui finit par être terrifiante, à l’image du nouveau système judiciaire mis en place: «Dans toutes les villes de France, les citoyens se réunissent une fois par mois pour juger les crimes et les délits de leur quartier. Les victimes ont droit à un avocat, mais pas les accusés, qui doivent apporter eux-mêmes la preuve de leur innocence».
Sur un rythme d’un livre tous les deux ans, après L’œil du paon (2019) et Soleil amer (2021), Lilia Hassaine Réussit parfaitement à cerner les enjeux de cette société qui se dessine. Très vite, on se rend compte que les inconvénients sont bien à la hauteur des bénéfices. Que devient l’intimité ? Qui n’a pas besoin de secrets? À l’heure où les réseaux sociaux dévoilent déjà beaucoup de nos vies, ou l’individualisme est érigé en système et où nombreux sont ceux qui se promènent casque aux oreilles, coupés du monde, voilà une réflexion habile qui se lit avec un plaisir constant.
Nous sommes au mi-temps du XXIème siècle.
Vingt ans auparavant, un crime impuni a entraîné la révolte de citoyens excédés par le laxisme de la justice. Après s’être livrés à une orgie d’expéditions punitives débouchant sur une amnistie générale, ils ont instauré une société de la Transparence pour assurer la sécurité de tous, ce qui s’est concrétisé par le remplacement, dans les bâtiments publics comme dans les habitations, des murs par des surfaces vitrées.
Désavouée, la classe politique n’a plus aucune influence. Les lois et les décisions de justice sont discutées et votées par le peuple sur internet.
C’est une société du moindre effort et de la moindre souffrance. Tout est fait pour faciliter et accélérer les actes de la vie quotidienne et pour domestiquer les sentiments. La visibilité permanente empêche les débordements, et entretient la tendance à l’exhibitionnisme de jeunes obnubilés par la diffusion de leur image.
Les quartiers ont acquis une rassurante dimension communautaire, où s’assemblent ceux qui se ressemblent, selon des critères culturels, sociaux ou religieux.
La littérature est expurgée de tout contenu susceptible de heurter.
C’est un monde de voisins vigilants et d’éclairage permanent, un monde où la peur n'existe plus. Le paradis terrestre ?
La narratrice elle-même, Hélène, ex-commissaire de police dorénavant Agent de protection est au départ plutôt convaincue du bien-fondé de cette transparence, qui a rendu plus attentifs aux autres, a supprimé les violences auparavant perpétrées à l'abri des murs. Elle a aussi permis de ramener à la maison son mari volage (ce n'est pas pour autant que leur couple se porte mieux, mais plutôt que d’exposer leurs dissensions aux yeux du monde, son époux lui chuchote avec délectation des paroles de désamour à l’oreille).
Son enquête sur l’inexplicable disparition d'une famille va remettre en cause toutes ses certitudes. Rose et Miguel Royer-Dumas, ainsi que leur fils Milo, semblent s’être évaporés sous les yeux de leurs voisins. Ils vivaient pourtant dans le quartier le plus chic de la ville. Les rumeurs ont tôt fait de rappeler les origines suspectes de Miguel, qui venait des Grillons, une zone de non-droit de la périphérie urbaine, où vivent dans des barres d'immeubles surpeuplées ou des pavillons en béton ceux qui ont refusé de se soumettre à la Transparence ou que la société n'a pas envie de voir parce qu'ils sont trop pauvres ou trop malades.
Au fil de ses investigations, Hélène prend peu à peu conscience des travers induits par un mode de vie qui limite les rapports vrais et profonds avec autrui, et de l’appauvrissement cognitif et intellectuel que génère une extrême visibilité étouffant la capacité à la subtilité et à l’interprétation de tout ce qui échappe à la rationalité, appauvrissement par ailleurs exhaussé par la superficialité, voire les mensonges, de réseaux d’information qui en entretenant les croyances de chacun, dissuadent de se confronter à l’altérité, sans même parler de divergence. Et puis elle réalise aussi que la transparence n’est pas forcément synonyme de vérité. Pour afficher au monde leur exemplarité, les individus, en reniant une part d’eux-mêmes, acquièrent une dimension factice et exempte de la complexité qui fait la richesse et la réalité des êtres.
Le monde dépeint dans "Panorama" n’est finalement qu’une simple extrapolation du nôtre. Il est en tous cas hautement crédible : obsession sécuritaire et développement de la surveillance, étiolement des débats de société antagonistes et profondément argumentés, reniement de la complexité des êtres, injonction tyrannique au bonheur ou à une pseudo perfection mortifère et uniformisante…
Et ce qui est sans doute le plus flippant, c’est que tout cela s’installe avec le consentement, voire l’active participation de la majorité des citoyens. Les personnages de Lilia Hassaine peuvent paraître désincarnés -y compris l’héroïne principale qui, si elle se pose en effet des questions, n’est pas dans une réelle remise en question du bien-fondé de l’éthique qui préside à ce fonctionnement sociétal-, mais il me semble qu’il s’agit là d’une volonté de l’auteure qui explore ainsi les conséquences d’un tel contexte sur la psychologie et la personnalité mêmes des individus -et c’est du coup assez malin !
Si les ficelles de l’intrigue policière (dont j’ai déjà oublié la résolution) sont plutôt grossières, les réflexions initiées par la lecture et l’écriture efficace de Lilia Hassaine m’ont fait passer un très bon moment.
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